Description

Gueux à manteau déchiqueté, 1631

Épreuve sur vergé mince du 8e état sur 8, le visage et la jambe droite ombrés de contre-tailles, et les deux traits verticaux échappés présents dans le bord inférieur du sujet.

Petites marges. De toute rareté.

Portraits de la solitude humaine: D’autres planches de gens de rue, exécutées à la même époque, sont à rapprocher de nos sujets : citons le Gueux assis se chauffant les mains (13.44); le Gueux assis sur une motte de terre (13.50); le Gueux à la jambe de bois (13.49) ; le Couple de mendiants à côté d’une butte (13.51); Le lépreux (13.18). Dans toutes, Rembrandt fait preuve d’une évidente empathie à l’égard de ses modèles – au point d’ailleurs de prêter ses traits au Gueux assis sur une motte de terre. À l’inverse de Callot ou de Bellange, sans doute plus détachés, Rembrandt n’use d’aucun ressort grotesque ou pittoresque. La tonalité de nos deux gravures est grave, pathétique : le dessin vibrant et parfois tremblotant de sa pointe vient saisir la fragilité de ces figures. Avec son Gueux à manteau déchiqueté, dont la silhouette claudicante disparaît dans l’ombre, Rembrandt brosse le portrait universel de la douleur et de la solitude humaines.

Sur les pas de Jacques Callot: Ces deux gravures appartiennent à l’œuvre de jeunesse de Rembrandt. Le peintre, résidant alors à Leyde où il partageait un atelier avec Jan Lievens (1607 † 1677), s’initia à l’eau-forte – sans doute auprès de son camarade – et fit l’acquisition d’estampes de Jacques Callot. S’inspirant de la série des Gueux (1622-1623) du célèbre maître nancéien, Rembrandt livre ici une image bouleversante de la misère humaine. Il n’eut qu’à croquer son sujet sur le vif : les rues de Leyde, en ce début du Siècle d’Or hollandais, offraient le spectacle de grands contrastes sociaux. L’opulence des boutiques de la riche cité drapière côtoyait l’indigence la plus extrême, le vagabondage et la mendicité, tous deux réprimés par les autorités municipales.

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